nous-entrons-dans-les-recifs.md (7281B)
1 <https://www.lemonde.fr/blog/petrole/2021/10/12/metaux-critiques-charbon-gaz-petrole-nous-entrons-dans-les-recifs/> 2 3 Il paraît de plus en plus évident que le monde que nous avons connu, 4 ne peut pas perdurer sans nous être fatal. Les faits et les données 5 s'accumulent! 6 7 C'est un long article, je mets les passages qui m'ont interpelés 8 ici. Notez que je ne soutiens pas la conclusion quant à l'appuie au 9 nucléaire ... 10 11 ## Le pétrole 12 13 > Le montant des réserves « 2P » dites « prouvées et probables », que 14 > les pétroliers considèrent comme le plus fidèle reflet de l’état du 15 > stock global de brut, décline depuis le milieu des années 1980, 16 > c’est-à-dire depuis que les découvertes annuelles de pétrole 17 > conventionnel sont systématiquement inférieures aux extractions de 18 > pétrole : depuis que l’on vide la baignoire plus vite qu’on ne la 19 > remplit. 20 > 21 > [...] 22 > 23 > si rien n’est fait, l’Europe risque fortement de manquer de pétrole 24 > au cours des années qui viennent, et à coup sûr au cours des années 25 > 2030 26 27 28 ## Le gaz naturel 29 30 > En résumé : une demande en essor systématique à cause de la sortie du 31 > charbon et du développement des renouvelables intermittents, et en 32 > face une production domestique en déclin irréparable. 33 > 34 > [...] 35 > 36 > Plus profondément, cette prise en ciseau entre hausse des besoins et 37 > épuisement de la production domestique risque de continuer d’aggraver 38 > l’effondrement des activités industrielles européennes qui réclament 39 > le plus d’énergie. 40 41 ## Le Charbon 42 43 > Mais en Chine, la demande de gaz naturel est d’autant plus forte que 44 > l’économie chinoise peine à redémarrer ses centrales à charbon. Au 45 > point que Pékin impose depuis plusieurs jours l’arrêt pur et simple de 46 > très nombreuses usines, ainsi que des coupures de courant affectant 47 > des centaines de millions de personnes. Pour l’heure, 20 provinces 48 > chinoises sur 31 ont fait état de coupures. Avec l’approche de 49 > l’hiver, la situation peut aisément prendre une tournure critique. 50 > 51 > En cause : des difficultés endémiques entravant la relance des 52 > carrières et des mines de charbon. 53 > 54 > [...] 55 > 56 > La dernière tendance à laquelle faisait référence David Fridley, 57 > l’évolution de l’EROI du charbon chinois (Energy return on investment, 58 > c’est-à-dire la quantité d’énergie à investir pour extraire une 59 > quantité d’énergie) paraît particulièrement symptomatique. 60 > 61 > [...] 62 > 63 > A rebours et incidemment, il apparaît plausible que les limites 64 > géologiques aperçues soient un aiguillon plus important et plus ancien 65 > que le climat pour nombre d’Etats et de géants industriels, dans 66 > l’évolution de leur stratégie de transition énergétique et/ou de 67 > puissance. Remarque déjà faite il y a longtemps sur ce blog : du côté 68 > des pétroliers occidentaux, l’enjeu climatique peut parfois sembler 69 > être un cache-misère devant leurs difficultés croissantes à trouver de 70 > nouvelles sources intactes et économiquement exploitables de 71 > pétrole. Dans un autre registre, pour le pouvoir en place à Pékin, à 72 > Moscou ou bien à Washington, les logiques foncières de puissance ont 73 > historiquement trait avant tout à la capacité à disposer de ressources 74 > adéquates en énergie pour effectuer ladite puissance, dans ses 75 > dimensions économiques, politiques, voire militaire. Dans les faits, 76 > la question du climat vient après, si elle vient... 77 > 78 > [...] 79 > 80 > Que le phénomène soit essentiellement conjoncturel, provoqué par la 81 > brutalité de la reprise post-covid, ou bien qu’il manifeste, à la 82 > lettre, des limites plus profondes, la crise énergétique que connaît 83 > la Chine affecte de façon sévère les chaînes d’approvisionnement de 84 > firmes telles qu’Apple ou Tesla. 85 > 86 > Encore plus significatif, peut-être : les prix du silicium, utilisé 87 > pour fabriquer les panneaux solaires photovoltaïques, ont triplé 88 > depuis le début du mois d’août, après que la province du Yunnan, 89 > centre majeur de fabrication, a ordonné une réduction drastique de sa 90 > production (90 % par rapport au moins d’août), officiellement au nom 91 > de ses efforts pour atteindre ses objectifs d’intensité 92 > énergétique. Si l’impact sur le coût total de fabrication des panneaux 93 > photovoltaïques sera plus restreint, il n’en devrait pas moins être 94 > significatif. Un analyste cité par l’agence Bloomberg évoque un prix 95 > passant de 1,8 à 2 yuans par watt, soit une hausse de l’ordre de 10 %. 96 > 97 > [...] 98 > 99 > dans un monde bas-carbone, quel peut être le coût et la disponibilité 100 > du solaire (et à tout prendre, de toute autre technologie de 101 > substitution aux énergies fossiles, même si c’est bien le 102 > photovoltaïque qui semble tout particulièrement vulnérable) ? 103 > 104 > La réponse, en tendance, semble évidente : tout sera plus compliqué, 105 > donc plus cher et, surtout, plus contraint, en premier chef pour les 106 > systèmes techniques les plus voraces en matières et donc en capitaux. 107 108 ## Minerais et métaux critiques 109 110 > La transition énergétique promet (menace ?) de passer de dépendances 111 > aux énergies fossiles à des dépendances à un certain nombre de 112 > minéraux et métaux particulièrement indispensables, de manière plus ou 113 > moins critique en fonction des choix techniques et organisationnels 114 > qui seront retenus dans des politiques de transition… qui restent pour 115 > l’essentiel inarticulées, nébuleuses ou contradictoires, en Chine, en 116 > France, en Allemagne, aux Etats-Unis et ailleurs. 117 > 118 > Disponibilité future de cobalt, de nickel, de lithium, de terres 119 > rares, de cuivre : autant de récif potentiels sur la voie périlleuse 120 > de la transition. Les capacités futures de développement de la 121 > production de ces métaux sont largement incertaines, et même 122 > inconnues. 123 > 124 > [...] 125 > 126 > Chaque technologie requise dans la plupart des scénarios de transition 127 > promet de réclamer des développements miniers et industriels énormes 128 > et contrastés. 129 > 130 > [...] 131 > 132 > L’hypothétique multiplication des besoins pour répondre à la demande 133 > induite par le développement mondial des technologies que l’AIE 134 > définit comme « propres » (clean energy technologies) apparaît 135 > vertigineuse. 136 137 ## Conclusion 138 139 > Nous tablons sur une sobriété systémique : non pas une sobriété qui 140 > demanderait à ceux qui n’ont rien ou pas grand chose de se serrer la 141 > ceinture, mais une réorganisation des grands organes vitaux de la 142 > société permettant à ces organes (agriculture, industries, transports, 143 > bâtiment, santé, culture, administration publique, etc.) de devenir 144 > beaucoup plus sobres en énergie et en matière, mais sans doute pas – 145 > par conséquent ! – en emploi... 146 > 147 > [...] 148 > 149 > Nous proposons de miser résolument sur une sobriété matérielle du 150 > système socio-économique dans son ensemble, et à cette fin, sur une 151 > réindustrialisation de la France limitée aux fonctions 152 > pertinentes. Pour ce faire, il nous faudra disposer sans doute d’un 153 > peu plus d’électricité décarbonée qu’aujourd’hui, ce qui ne peut être 154 > accompli à nos yeux sans le maintien d’une industrie nucléaire 155 > puissante et fiable, capable à terme d’évoluer à nouveau.